Libertatia ou le cent-deuxième département

Créée en 2015, Libertatia ou le 102 ème Département, troupe de théâtre hybride, convivialiste, inter-générationnelle et familiale, laboratoire de création transversale, mêle les publics et les intervenants, les amateurs pour certains en difficulté et les professionnels du spectacle vivant, pour certains précarisés.

Initié par Félix Antoine Lunven et Magdi Rejichi respectivement metteurs en scène de L’Embobineuse, à la fois salle de concert et théâtre de fortune, et de la compagnie de théâtre Peanuts, ce projet protéïforme est développé en partenariat avec l’association, spécialisée dans l’action sociale, Nouvelle Aube et leur revue Sang d’Encre.

Afin de mêler l’action artistique, les actions d’éducation populaire et les actions sociales Félix Antoine Lunven et Magdi Rejichi s’appuient sur les récits de vie des participants comme matière première de réflexion et de création.

Libertatia ou le 102 ème Département est à la fois :

  • Un projet de création artistique autour du théâtre, de la musique, de la performance mais aussi d’autres disciplines telles que la vidéo, la philosophie, la sociologie, la métaphysique... Aussi, depuis 2016, un travail collaboratif s’effectue avec la revue Sang d’Encre éditée par Nouvelle Aube, autour de l’écriture, de la publication des récits de vie des membres de Libertatia ou le 102 ème Département.
  • Un projet d’éducation populaire dont l’objectif est de libérer la parole sur les mécanismes d’exclusions et de violences afin d’ouvrir des pistes de réflexions et d’actions pour faciliter les luttes contre les discriminations, le racisme, le sexisme, la ségrégation... Une collaboration avec le Crefada (association de formation en éducation populaire) a lieu de façon ponctuelle grâce à des interventions au sein des répétitions de Libertatia.
  • Un projet de soutien aux plus démunis, aux publics marginalisés, en détresse sociale. L’accès gratuit à la pratique artistique et la réflexion générée par la pratique de l’éducation populaire permettent aux publics les plus fragilisés d’améliorer leurs conditions de vie tant quotidienne que professionnelle.

À la fois projet de soutien pour un public défavorisé et pour des professionnels précarisés ou/et en voie de professionnalisation, Libertatia facilite pour tous.tes l’accès à l’emploi et mieux encore, en crée.

Hormis les intervenants (metteurs en scène, musiciens.ennes, plasticiens.ennes, formateur. trice en éducation populaire...) pour qui Libertatia est un projet à la fois motivant et une source d’emploi, les participant.e.s, quant à eux et elles, sont stimulé.e.s par le théâtre et les pratiques artistiques dont les thèmes de recherche et d’action s’édifient à partir de leurs propres récits de vie, ce qui leur permet d’acquérir de la confiance et d’évoluer dans leur parcours.

De plus, ces artistes qui viennent aux répétitions Libertatia, trouvent des opportunités d’emploi. En effet, deux comédien.enne.s ont été employé.e.s par La Cie Peanuts sur deux de leurs créations en cours, De Chair et d’Octet et Fin de la 4ème partie.

CONCEPT

Dès les débuts, l’objectif était de travailler avec un groupe de personnes le plus hétéroclite possible, toutes catégories confondues comme si le désir était de recréer ensemble sur le plateau de théâtre, une sorte de micro-société aussi plurielle et multiculturelle que l’environnement réel. La troupe se rassemble pour faire exploser sur scène la poésie des corps et leurs histoires bouleversantes qui au final se rencontrent sur un même territoire. Ainsi, cette action valorise l’histoire et la mémoire des territoires pour participer à la construction collective.

OBJECTIFS

Consolider un tissu local autour de la culture et du bien commun. Participer, à travers l’action culturelle à la réduction des fractures sociales.

Produire et diffuser la diversité artistique et culturelle.

Ouvrir à tous.tes la possibilité de rencontrer sa propre capacité de créativité et de transformation.

POURQUOI LIBERTATIA OU LE 102ÈME DÉPARTEMENT ?

Libertatia (ou Libertalia) est le nom d’une supposée république utopique fondée par des pirates sur une île au large de Madagascar, qui aurait existé à la fin du XVIIe siècle, sans que l’on sache vraiment s’il s’agit d’une réalité ou d’une légende.

Pourquoi le 102ème département ? La France compte 101 départements, Mayotte étant devenu en 2011 le 101ème département de France. Ayant à cœur de réenchanter la devise républicaine « Liberté, Égalité, Fraternité », le groupe d’habitant.e.s du quartier de la Belle de Mai a pensé nécessaire, au vu des difficultés se faisant sentir dans l’air du temps, de fonder un 102ème département.

Présent quelque part entre les interstices des 101 départements déjà existants, Libertatia permet de rassembler toutes celles et ceux qui font exister une certaine idée du vivre ensemble et de la solidarité, et d’accueillir tous.tes les naufragé.e.s de la République, en marge et au-delà des clivages communautaires, des conflits générationnels, de la lutte des classes, du choc des civilisations...

INNOVATION

Il est à noter que Félix Antoine Lunven et Magdi Rejichi développent de réelles techniques étonnantes afin de permettre à des personnes empêchées (problème d’élocution, problèmes psycho-moteur, illettrisme, incompréhension de la langue française...) d’écrire et/ou de dire du texte dans un contexte de création artistique où la qualité du rendu est de mise. Les metteurs en scène s’appuient sur des méthodes tels que le sport-spectacle inventé par Félix Antoine Lunven, l’athlétisme affectif d’Antonin Artaud et des concepts influencés par le travail de Kantor (Théâtre de la mort et théâtre zéro) ou encore par le travail de l’ethnologue Jean Rouch sur la transe (Le maîtres fous). Par exemple il peut s’agir de jeux issus de l’animation poussés et exacerbés jusqu’à leurs paroxysmes afin d’en faire théâtre. Ces techniques permettent de court-circuiter les blocages divers et variés, de libérer le mouvement et la parole. De fait les participants deviennent capables là où ils ne pensaient pas être capables.

TYPE DE PUBLIC

Actuellement, une quinzaine de personnes de divers générations, dont des enfants avec leurs parents, participent au projet Libertatia.

D’origine divers et de l’ensemble du territoire français, les participant.e.s sont tous.tes marseillais.es d’adoption. Ce groupe hétéroclite est porté par un collectif d’habitant.e.s de la Belle de Mai et des quartiers nords, âgé.e.s de 8 à 80 ans, auxquel.le.s s’ajoutent des électrons libres, comme certain.e.s artistes amateurs confirmés ou en voix de professionnalisation et/ou précarisés habitant pour la majorité à Marseille dans les quartiers de veille.

Depuis la saison 2018-2019, des personnes adhérentes du GEM suivant un traitement psychiatrique sous tutelle et certain.e.s travaillant au sein d’un ESAT participent à Libertatia. Depuis 2020, des personnes suivies par Nouvelle Aube ont intégré le groupe.

Ce projet est accessible à tous.tes gratuitement, à partir de 5 ans (accompagné par les parents) jusqu’à un âge illimité selon les places disponibles (jusqu’à 30 participants en temps normal, hors covid). Une attention particulière est porté envers les publics empêchés, les minorités et les diversités culturelles.

De plus le groupe sollicite régulièrement des intervenant.e.s issu.e.s des métiers artistiques et sociaux (musicien.ne.s, plasticien.ne.s, actrices du milieu de l’éducation de populaire...).

Nouvelle Aube, qui s’occupe d’un public très en difficulté (migrants, sdf, toxicomanes...) organise régulièrement des évènements, en effet, lors des sorties de leur revue Sang d’Encre, Libertatia est convié à présenter sa création en cours ou encore à improviser des lectures musicalisées des récits de vie en travail. En plus de permettre la diffusion des créations libertatiennes, ces événements encouragent la mixité et les rencontres des différents publics.

ZONES GÉOGRAPHIQUES

Ce projet est développé dans plusieurs quartiers prioritaires de la politique de la ville et particulièrement dans le quartier de la Belle de Mai, dans le 3ème arrondissement de Marseille. Les participants, soit une quinzaine de personnes, viennent du quartier de La Belle de Mai mais aussi des quartiers Nord de Marseille, ainsi que des quartiers de veille. Les représentations ont lieu dans divers quartier de la ville, lors des événements auxquels Libertatia est invité. Le rayonnement de Libertatia est très local puisque c’est l’un des objectifs, consolider un tissu local autour de la culture et du bien commun dans et depuis un quartier prioritaire. Mais ce projet est prêt à s’exporter jusqu’à l’international.

COVID 19 ET AVENIR DU PROJET

En 2019-2020 les ateliers de création et de recherche continuent, des petites formes sont montées et jouées lors de divers événements pour lesquels la troupe est sollicitée. Pour cette saison 2021-2022, le travail initié avec Nouvelle Aube, partenaire social, se prolongera, ainsi que la coopération entre La Cie Peanuts et L’Embobineuse. En 2020, Nouvelle Aube a soutenu financièrement l’action Libertatia afin qu’elle puisse perdurer. Elle continue en 2021.

Amputé de nombreuses séance de travail à cause de la crise sanitaire, le groupe sera amené à poursuivre en 2021-2022 la collaboration initiée en 2019 avec le musicien Victor Huguenin et son projet Coronal Mass Ejection en vue de la création d’un spectacle. Une résidence est envisagée, en collaboration avec Lézarap’art, à la Cité des Arts de la Rue, sur une proposition de Lieux Publics, dans leur espace.

Parallèlement, un travail de compilation littéraire et d’édition est envisagé autour des paroles, textes et témoignages livrés par les membres du groupe.

Bien que la crise sanitaire ait mis un frein à ce type de collaboration, les projets avancent. Par ailleurs, un soutien concret et un accompagnement est apporté aux participants dans leurs désirs d’actions et leurs prises d’initiatives individuels.